Mois : septembre 2025

L’évolution des recommandations internationales a accéléré le parcours des enfants sourds, passant du repère 1-3-6 / 3-6-12 mois (dépistage, diagnostic, appareillage) au schéma 1-2-3 /1-3-6 mois. En cas de surdité profonde bilatérale congénitale, l’implantation cochléaire est désormais proposée avant 12 mois.

Ces avancées redéfinissent les attentes cliniques et la prise en soin orthophonique. Que peut-on espérer d’un enfant implanté très précocement avant un an ? Quels sont les attendus perceptifs et langagiers à 6 mois, 1 an et 2 ans post-implantation ? Quand faut-il s’alerter et adapter le suivi orthophonique ?

Seront abordés :

• – les bénéfices attendus sur le développement perceptif et langagier avant l’entrée à l’école,
• – les ajustements nécessaires dans le suivi orthophonique des enfants implantés
  précocement.
• – des repères cliniques pour identifier les signaux d’alerte et soutenir la décision
  pluridisciplinaire.

L’objectif est de clarifier les attentes réalistes en 2025 et d’outiller les orthophonistes dans leur pratique clinique pour accompagner au mieux ces parcours précoces.

Aude de Lamaze, SESSAD Hermès/Unité Ressources Audition, ASEI, Toulouse.

En orthophonie, l’éducation auditive de l’enfant sourd dépasse aujourd’hui l’acquisition de la perception dans le silence pour s’inscrire dans le développement de compétences dites d’audition complexe, essentielles à la communication et à la vie sociale.

Dès son entrée en collectivité à la crèche ou à la maternelle, un enfant sourd évolue et tente de comprendre son interlocuteur dans un bruit ambiant de 65/70dB, pouvant atteindre les 80/90dB quand son copain crie, pleure ou exprime son mécontentement.

Le développement de l’identification et de la compréhension dans le bruit, de la discrimination fine, de la localisation et de l’attention auditive sont des enjeux et des objectifs de travail en orthophonie avec l’enfant sourd et sa famille dès son plus jeune âge. Nous savons que ces capacités d’audition centrale peuvent évoluer jusqu’à l’adolescence. 

Si les appareillages d’aujourd’hui (implants cochléaires et prothèses auditives) constituent des outils puissants et de plus en plus fonctionnels, leur efficacité dépend également d’un entraînement auditif précis et de bonne qualité, en orthophonie mais également tout au long de sa journée. 

Les enjeux sont considérables : accéder à un niveau de langage élaboré, développer l’attention et la mémoire auditives, soutenir la cognition et favoriser son autonomie au quotidien.

Les évolutions récentes de pratique de soin ouvrent de nouvelles perspectives. 

Le télésoin permet aujourd’hui d’assurer une continuité du travail au-delà des séances en présentiel, en impliquant les familles dans les apprentissages auditifs quotidiens et en abordant un travail plus spécifique comme l’écoute au téléphone. L’Intelligence Artificielle nous offre des outils innovants permettant d’individualiser les exercices à faire avec l’enfant.

L’orthophoniste vise également à rendre l’enfant et sa famille acteurs d’une perception de qualité. Apprendre à repérer les situations dans lesquelles l’enfant est en difficulté pour percevoir et savoir s’adapter en conséquence permet d’améliorer la qualité de vie, l’autonomie et la confiance des enfants. Cette éducation thérapeutique du patient lui permet d’accéder à une compréhension de qualité en se servant de tous les outils qu’il a à sa portée.

Cette communication tentera de présenter de façon pratique les stratégies d’intervention orthophonique permettant d’optimiser le traitement de l’audition complexe ainsi que les nouvelles dynamiques offertes par les évolutions récentes de pratique de soin.

Il s’avère aujourd’hui primordial de pouvoir accompagner en rééducation les enfants présentant des atteintes vestibulaires, qu’elles soient congénitales ou acquises, isolées, associées à un déficit auditif ou éléments d’une pathologie syndromique. Compte tenu des impacts possibles d’une atteinte vestibulaire, la prise en charge précoce apparait essentielle pour aider l’enfant à mettre en place les différentes stratégies de compensation par l’adaptation et/ou la substitution. Après un bilan vestibulaire et postural minutieux, adapté selon l’âge de l’enfant, le kinésithérapeute proposera des exercices ciblés, actifs, personnalisés, évolutifs et écologiques, répondant aux principes de la rééducation vestibulaire, pour que l’enfant puisse construire et élaborer ses modèles internes lui permettant un développement posturo-moteur le plus efficient possible.

Cécile BECAUD
Kinésithérapeute (Neuvéglise sur Truyère-15)
DIU « Explorations et rééducation des vertiges et des troubles de l’équilibre » Université Claude Bernard – Lyon 1

Références articles :

• Vestibular rééducation for children ; 2018

Rose Marie Rine

• Guidelines of the French Society of Otorhinolaryngology and Head and Neck Surgery (SFORL) for vestibular rehabilitation in children with vestibular dysfunction. A systematic review; 2024

Pierre Reynard José Ortega-Solís Sophie Tronche Vincent Darrouzet  Hung Thai-Van

Abstract – résumé de l’intervention : « Évolution de l’accompagnement parental du point de vue sociologique »

« Les relations qu’entretiennent l’État, les institutions éducatives et sanitaires ainsi que les professionnel-le-s avec l’enfant et ses parents sont au cœur de l’histoire de la famille contemporaine. Ces rapports et leur articulation conditionnent les pratiques pédagogiques vis-à-vis des enfants mais façonnent aussi les attendus normatifs en matière d’attitudes éducatives et de relations affectives que les familles se devraient de tenir à l’égard de leurs propres enfants.

Ainsi, que nous dit l’expression actuellement en vogue  » accompagner son enfant  » ?

À quels types de rapports entre familles et institutions renvoie l’accompagnement à la parentalité ?

La coopération entre familles et professionnel-le-s, qui suppose de passer de la confrontation des savoirs à leur articulation, est-elle possible ?

Et que veut dire  » mettre l’enfant au centre « , notamment quand cet enfant est sourd ? »

La surdité psychogène, aussi appelée surdité fonctionnelle, ou encore surdité non organique, porte des noms multiples qui annoncent déjà la complexité du sujet et la multitude des cadres de référence qu’elle appelle.

Un large champ est encore à découvrir concernant les pathologies fonctionnelles, qui ont suscité une grande fascination à la fin du XIXe siècle, puis qui ont été progressivement laissées de côté et moins étudiées à partir de la moitié du XXe. Elles connaissent une nouvelle vague des recherches et de questionnements, remettant à jour les théories médicales, psychologiques, psychiatriques, neurologiques, afin de mieux les comprendre, mieux les expliquer, pour mieux les accompagner.

Mais en attendant les découvertes à venir, 1 à 3% des enfants et adolescents qui se présentent en consultation d’audiophonologie, ont une plainte auditive correspondant aux critères diagnostique d’une surdité psychogène.

Se posent alors les questions, une fois le diagnostic suspecté, de :

• – comment l’aborder avec la famille
• – comment en échanger avec l’enfant ou l’adolescent
• – que proposer
• – et comment l’accompagner.

Nous aborderons dans cette présentation les critères diagnostic d’après les classifications actuelles avant de détailler les profils des enfants et adolescents rencontrés, pour enfin aborder les pistes d’accompagnement, face à cette pathologie souvent laissée de côté.

L’aplasie d’oreille, mineure ou majeure, est une malformation congénitale uni ou bilatérale qui touche à la fois partie externe et moyenne de l’oreille. Elle entraine chez l’enfant une double problématique liée à la surdité et à l’éventuelle prise en charge esthétique du pavillon de l’oreille. Les dépistage et suivi auditif jusqu’au développement du langage sont essentiels, et des solutions auditives, si elle sont proposées, doivent être adaptées à la forme de la petite oreille. Dans cette présentation, les bilans à réaliser ainsi que leurs chronologies vont être exposés. Les solutions auditives et esthétiques seront détaillées, ainsi que leurs prises en charge financières en France.

Présentation réalisée par le Dr Charlotte Célérier, Praticien Hospitalier à l’hôpital Necker Enfants Malades, Centre de référence des maladies rares tête et cou, spécialisée en otologie et dans la prise en charge des malformations d’oreilles.

liens utiles :

https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2021-09/synthese_mg_aplasie_majeure_d_oreille.pdf

https://www.tete-cou.fr/pathologies/malformations-orl-et-cervico-faciales/aplasie-d-oreille

https://www.linkedin.com/company/france-microtie

Dr Stéphane GARGULA, ORL, Hôpital de la Conception, Marseille
Dr Marie-Noëlle CALMELS, ORL, Hôpital Pierre Paul Riquet, CHU de Toulouse

L’évaluation du seuil auditif d’un enfant repose sur la multiplication des tests comportementaux, audiométries tonales et vocales quand elles sont possibles, réalisés par des équipes aguerries associée aux différents tests objectifs performants disponibles sur le marché. La détermination de ce seuil indispensable au diagnostic est cependant insuffisante pour évaluer le retentissement global et complexe de la perte auditive sur l’enfant et son environnement :  développement du langage, fonctions cognitives, comportement et intégration sociale, scolarisation et résultats académiques, qualité de vie globale. Une approche multidimensionnelle est indispensable à une prise en charge optimale et repose sur le travail et la coordination d’une équipe multidisciplinaire intégrant professionnels médicaux et para-médicaux mais aussi l’enfant, la famille et l’équipe enseignante.

L’amélioration de l’évaluation qualitative auditive repose principalement sur la réalisation de tests de compréhension dans différentes conditions d’écoute adaptés à l’âge et aux capacités de l’enfant.

L’association à une évaluation vestibulaire et du développement moteur plus systématique permet également d’adapter les prises en charge tout en nuançant les attentes de l’enfant et ses parents à cette dernière.

L’évaluation de l’environnement familial et le recueil des constations des parents dans la vie quotidienne qu’ils partagent avec leur enfant est primordiale. De nombreux questionnaires adaptés sont disponibles dans la littérature mais principalement en anglais. Récemment le Speech, Spatial and Qualities of Hearing scale pour les parents (SSQ-P) et pour les enfants (SSQ-Ch) ont été traduits et évalués en français et sont de très bons outils d’évaluation subjective du retentissement de la surdité. De la même manière le score de PEACH validé en français peut être utilisé.  Ces questionnaires permettent d’intégrer des mesures de résultats standardisées et validées pour quantifier la qualité de vie et le fonctionnement psychosocial de l’enfant sourd.

La connaissance des conditions d’apprentissage (environnement scolaire, conditions de scolarisation et d’études) est indispensable à la compréhension de difficultés potentielles et aux aménagements à trouver. Des entretiens détaillés et des groupes de discussion avec les enfants, les parents et les enseignants doivent être proposés.

Enfin une évaluation du retentissement psychologique et un suivi éventuel doivent être proposés.

Cette approche multidimensionnelle constitue la meilleure pratique actuelle d’évaluation et offre une voie prometteuse pour atténuer les impacts complexes de la surdité chez les enfants.

Implantation ultra-précoce

L’implantation cochléaire ultra-précoce (avant 12 mois, idéalement avant 6 mois) représente une avancée majeure dans la prise en charge de la surdité profonde congénitale. Cette approche tire parti de la période critique de plasticité cérébrale maximale pour le développement auditif et du langage.

Particularités :

• Nécessite un diagnostic néonatal fiable et rapide via le dépistage systématique
• Bilan pré-implantation adapté (imagerie, évaluations électrophysiologiques)
• Défis techniques liés à la petite taille de l’anatomie pédiatrique
• Importance cruciale de l’accompagnement parental et orthophonique précoce

Résultats attendus : Les enfants implantés avant 12 mois, et particulièrement avant 6 mois, montrent des performances nettement supérieures : développement du langage oral proche de celui des enfants normo-entendants, meilleure intelligibilité de la parole, et capacités de communication facilitant l’intégration scolaire en milieu ordinaire. Plus l’implantation est précoce, plus les résultats sur le développement linguistique sont favorables.

Surdité unilatérale complète (SSD – Single Sided Deafness)

L’implantation cochléaire dans les surdités unilatérales chez l’enfant est une indication relativement récente, longtemps controversée mais aujourd’hui de plus en plus reconnue.

Particularités :

• Auparavant non prise en charge, car l’oreille controlatérale compense partiellement
• Période sensible critique : l’implantation doit idéalement intervenir avant 3-5 ans pour éviter une privation auditive prolongée de l’oreille sourde
• Indication validée pour prévenir les difficultés de localisation spatiale des sons et de compréhension dans le bruit
• Prévention des retards de langage et des difficultés d’apprentissage

Résultats attendus : L’implantation précoce permet une restauration de l’audition binaurale avec amélioration significative de la localisation spatiale des sons, meilleure compréhension en environnement bruyant (notamment en milieu scolaire), et prévention des troubles du développement du langage. Les résultats sont d’autant meilleurs que l’implantation est précoce, avant que la privation auditive n’entraîne une réorganisation corticale irréversible.

EAS (Stimulation Électro-Acoustique)

L’EAS combine l’implant cochléaire pour les fréquences aigües et l’amplification acoustique conventionnelle pour les fréquences graves préservées, dans la même oreille.

Particularités :

• Indication pour les surdités partielles avec audition résiduelle en basses fréquences
• Nécessite une technique chirurgicale atraumatique pour préserver les structures cochléaires résiduelles
• Utilisation d’électrodes plus courtes et flexibles
• Nécessite une audioprothèse spécifique combinant les deux modes de stimulation
• Réglages plus complexes nécessitant une expertise technique spécialisée

Résultats attendus : L’EAS offre des performances remarquables, notamment une meilleure perception de la musique grâce à la préservation de l’audition naturelle dans les graves, une qualité sonore plus naturelle, et d’excellents résultats en reconnaissance vocale, souvent supérieurs à l’implant cochléaire seul. La perception des voix et la compréhension dans le bruit sont particulièrement améliorées. Le principal enjeu reste la préservation à long terme de l’audition résiduelle.

Conclusion

Ces trois indications illustrent l’évolution des pratiques en implantation cochléaire pédiatrique vers une prise en charge plus précoce et plus nuancée, adaptée à différents profils de surdité. Le succès de ces approches repose sur un diagnostic précoce, une prise en charge pluridisciplinaire coordonnée, et un accompagnement orthophonique intensif des enfants et de leur famille.