Dépistage néonatal de la surdité en Belgique : Impact d’une réadaptation précoce sur le développement langagier des enfants sourds

Dr DEVROEDE Benoît

ORL-PH, Hôpital Universitaire des Enfants Reine Fabiola, Centre Comprendre et Parler, Bruxelles

Dr CIARDELLI Roberta

Pédiatre - Réadaptateur, Centre « Comprendre et Parler », Bruxelles

Introduction

Le dépistage systématique de la déficience auditive néonatale est implémenté en Belgique francophone (Fédération Wallonie-Bruxelles) depuis 2006. 

Lorsque le diagnostic de surdité est posé chez l’enfant, la mise en place d’une réadaptation adéquate reste un défi et dépend de divers facteurs. Une bonne compréhension de ces derniers par les professionnels impliqués dans le parcours de réadaptation est essentielle pour garantir une efficacité maximale. 

Nous aborderons l’organisation du dépistage auditif néonatal en Belgique francophone ainsi que les résultats d’une étude rétrospective réalisée au Centre Comprendre et Parler, centre de réadaptation pour enfants sourds. 

Objectif

Cette étude vise à comparer le développement du langage oral ainsi que certaines caractéristiques démographiques parmi une large cohorte d’enfants sourds en fonction de la précocité de prise en soins.

Méthodes

Nous avons mené une étude rétrospective incluant 171 enfants âgés de moins de 13 ans atteints de déficience auditive congénitale bilatérale. Ces enfants ont été répartis en deux groupes : le groupe intervention précoce suivi avant l’âge de 6 mois et le groupe intervention tardive suivi après l’âge de 6 mois. Les variables étudiées au sein de ces deux groupes incluent : le dépistage néonatal de la surdité, l’âge au moment de l’identification de la perte auditive, le niveau d’éducation de la mère, le degré d’implication de la famille et les compétences linguistiques de l’enfant.

Résultats

53% des enfants font partie du groupe intervention précoce et 47% des enfants ont débuté leur parcours en réadaptation après l’âge de 6 mois.
L’âge médian de début de réadaptation dans le groupe intervention précoce est de 3 mois et de 18 mois dans le groupe intervention tardive.
11 enfants (6% de la cohorte) n’ont pas bénéficié de dépistage auditif néonatal et appartiennent au groupe intervention tardive.
Le niveau de langage en compréhension est non pathologique parmi 70% des enfants du groupe intervention précoce et parmi 47% des enfants du groupe intervention tardive.
60 % des enfants du groupe intervention précoce présentent un niveau de langage en expression non pathologique. Par contre, seulement 33% des enfants du groupe intervention tardive partagent ce même statut.
Le niveau d’implication de la famille et le niveau d’éducation de la mère sont significativement plus élevés dans le groupe intervention précoce.

Conclusions

Le dépistage auditif en période néonatale permet d’orienter rapidement l’enfant vers un centre de réadaptation. La précocité de l’intervention est associée à un meilleur développement langagier : les enfants qui bénéficient d’une intervention précoce obtiennent des résultats significativement meilleurs en ce qui concerne de langage oral (en compréhension et en expression) par rapport aux enfants qui ont commencé la réadaptation après l’âge de 6 mois.
Cependant, parmi cette cohorte d’enfants sourds congénitaux nés depuis l’introduction du dépistage auditif, près de la moitié ont débuté leur suivi après l’âge de 6 mois. Une attention particulière est donc nécessaire afin de s’assurer que le dépistage auditif aboutisse à une prise en soins précoce, notamment pour les familles à faible statut socio-économique.