Pr TEISSIER Natacha
ORL-PUPH, Inserm U1141, Hôpital Robert Debré, Paris
Dépistage du CMV associé au dépistage auditif (propositions de la FFADAN)
L’infection en cours de grossesse par le CMV est la première cause de surdité congénitale après les étiologies génétiques. Elle peut aussi être à l’origine d’une surdité de survenue secondaire, parfois plusieurs mois après la naissance. La difficulté dans le suivi d’un enfant présentant une infection congénitale par le CMV est donc double : chez un nouveau-né identifié comme infecté en cours de grossesse, comment optimiser la prise en charge multidisciplinaire et le suivi pour identifier au plus tôt la survenue d’une séquelle neurosensorielle ? L’identification de signes cliniques chez un enfant infecté peut impliquer la mise en route d’un traitement antiviral néonatal pour limiter les complications. Chez un nourrisson présentant une surdité repérée à la suite du dépistage neonatal systématique, comment établir rétrospectivement qu’une infection congénitale par le CMV peut en être responsable ? L’identification précoce de l’infection est essentielle dans ces deux situations.
Le caractère congénital de l’infection par le CMV sur prélèvements biologiques ne peut être affirmé que pendant les 15 premiers jours de vie de l’enfant ; au-delà, la positivité d’un prélèvement qu’il soit urinaire, sanguin ou salivaire peut aussi être le reflet d’une infection post-natale, dont le pronostic neurosensoriel n’est pas du tout comparable. Il est donc intéressant de pouvoir d’évaluer le plus précocement possible le risque d’exposition d’un nourrisson au CMV pour que cette information soit le témoin fiable de son statut néonatal.
Le Haut Comité de Santé Public recommande depuis 2018 un dépistage ciblé du CMV sur, entre autres points d’appel, l’échec au test auditif en maternité ; cependant, il a récemment réémis un avis défavorable pour la mise en place d’un dépistage systématique du CMV en cours de grossesse et à la naissance. Les praticiens n’ont donc pas connaissance du statut des mamans et a fortiori des enfants, et de ce fait, du risque de développer des complications suite à une infection passée inaperçue. Compte-tenu de cette contrainte, la question posée au groupe de travail CMV de la FFADAN a été de réfléchir à optimiser le dépistage néonatal du CMV en s’appuyant sur le dépistage auditif qui lui est instauré depuis plusieurs années et déployé sur tout le territoire.
Les modalités de cette démarche ont donc été définies pour essayer de coller au mieux aux contraintes techniques et temporelles : le test urinaire pratiqué dans les 15 jours reste l’examen de référence le plus sensible et spécifique de l’infection congénitale. Le groupe de travail recommande ainsi de réaliser ce test chez les enfants présentant au moins un échec au dépistage auditif (par otoémissions ou PEA automatisé) lors du retest T2 avant la sortie de la maternité. En effet, du fait de la difficulté d’organiser un T3 systématique avant J15 à travers le territoire, l’absence de prise en charge bien codifiée des examens pratiqués en externe et afin de limiter les perdus de vue, le groupe de travail s’est positionné en faveur du T2 bien que cela puisse générer un plus grand nombre de tests.
Le test salivaire est de mise en place plus commode, mais peut être faussement positif par une contamination lors de l’allaitement : sa positivité requiert donc un contrôle par un test urinaire. La quantification par PCR permet d’orienter sur le caractère congénital de l’infection en fonction du seuil mesuré.
Au-delà des 15 jours de vie, devant l’identification d’une surdité, on peut s’appuyer sur un diagnostic rétrospectif par une recherche PCR sur carton de Guthrie : la positivité de ce prélèvement permettra d’authentifier l’infection congénitale. La contrainte temporelle est celle de la durée de conservation de ces cartons qui varie selon les régions et peut de ce fait limiter l’accessibilité au diagnostic rétrospectif.
Lors de la présentation, les principaux éléments de la recommandation de la FFADANN seront abordés et discutés. Aussi, de l’identification précoce de l’infection congénitale dépend une prise en charge adaptée qui repose sur un bilan adapté et répété et éventuellement la proposition d’un traitement antiviral.